CA - Paris - 28 novembre 2024 - RG 24/03935


Date de la décision : 28/11/2024
Juridiction : Cour d'Appel de Paris
Numéro RG : 24/03935
Catégorie : Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Délais supplémentaires - "Renouvelables"
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Mauvaise foi
ProcĂ©dures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriĂ©taire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > TrĂȘve hivernale
Procédures d'expulsion > Squat d'habitation > Le propriétaire est une personne morale (public, entreprise, hlm) > Juridictions > Juge des Contentieux de la Protection - JCP / Cour d'Appel - CA > Voie de fait
Mots clĂ©s : Cour d'appel dĂ©lai dĂ©lais de grĂące entreprise habitation mauvaise foi morale trĂȘve hivernale voie de fait


ProcĂ©dure : Appel d’une ordonnance du TI de Montreuil du 31 janvier 2024
Demandeur / Défendeur : Demandeur
Date d’ouverture du lieu : avril 2023
Date d'assignation devant le JCP : 26 juillet 2023
DĂ©cision de 1er instance du 31 janvier 2024 : expulsion aprĂšs un dĂ©lai de 15 jours seulement (sans la trĂȘve hivernale)
Propriétaire : SCCV M83R (SCI)
Contexte de l’ouverture : Personnes seules + Association

RĂ©sumĂ© de la dĂ©cision : Le juge de la cour d'appel infirme la dĂ©cision de premiĂšre instance en accordant le dĂ©lai lĂ©gal de 2 mois aprĂšs le commandement de quitter les lieux (412-1), la trĂȘve hivernale (412-6) ainsi que 3 mois de dĂ©lais complĂ©mentaires (412-3 et 4).

DĂ©lai de deux mois (412-1) et trĂȘve hivernale (412-6) : Il n'y a pas de voie de fait imputable aux habitant-es. Un point sur la mauvaise foi.

       "Le premier juge a fait droit aux demandes de la SCCV M83R aprĂšs avoir retenu que les dĂ©fendeurs Ă©taient entrĂ©s dans les locaux de maniĂšre consciente sans aucune autorisation rĂ©glementaire ou bail, ajoutant que de surcroĂźt il ressortait des piĂšces versĂ©es aux dĂ©bats que le site Ă©tait clos et muni d'une alarme, laquelle s'est dĂ©clenchĂ©e le 19 dĂ©cembre 2022, lorsque les dĂ©fendeurs se sont introduits dans les lieux.
Toutefois, ce faisant il n’a pas constatĂ© la mauvaise foi des parties dĂ©fenderesses, ni n’a suffisamment caractĂ©risĂ© comme leur Ă©tant imputable ni une voie de fait, ni l’exercice de violences ni le recours Ă  la ruse pour pĂ©nĂ©trer dans les lieux."

Bien que le juge Ă©tudie ici la mauvaise foi, il prĂ©cice par ailleurs qu'Ă  travers les dĂ©bats parlementaires pendant la loi Kasbarian, il s'en dĂ©duit que la nouvelle disposition de "mauvaise foi" permettant de supprimer le dĂ©lai lĂ©gal de deux mois s'applique uniquement aux locataires et le reste des dispositions (voie de fait, maneuvre, menaces et contraintes) aux squatteurs. 

       "(...) Il s’en dĂ©duit que le lĂ©gislateur a dĂ©cidĂ© de distinguer clairement la situation des locataires, de celles des occupants entrĂ©s illicitement dans les locaux en permettant d’exclure ces derniers, en raison de la nature de cette intrusion, du bĂ©nĂ©fice de dĂ©lais supplĂ©mentaires pour se reloger et de la trĂȘve hivernale."

Délais complémantaires (412-3 et 4) : situation de vulnérabilité justifiant l'octroi de délais.

       "S’agissant des dĂ©lais de grĂące susceptibles d'ĂȘtre accordĂ©s au titre des articles L.412-3 et L.412-4 du code de procĂ©dure civile d'exĂ©cution prĂ©citĂ©s, il convient d’observer que les parties appelantes se rĂ©fĂ©rant Ă  leurs piĂšces 7 et 8, font valoir Ă  juste titre qu’elles se trouvaient dans une situation de vulnĂ©rabilitĂ© et de prĂ©caritĂ© justifiant qu’elles puissent en bĂ©nĂ©ficier (...)

Aussi au vu des piĂšces produites et alors qu’il n’est pas justifiĂ© que le relogement des intĂ©ressĂ©s pouvait avoir lieu dans des conditions normales, il convient d’accorder aux parties appelantes le bĂ©nĂ©fice d’un dĂ©lai de trois mois au titre de ces dispositions."

Assignation :

Un procĂšs est engagĂ© contre toi, tu es « assignĂ© Ă  comparaĂźtre » et ça veut dire que le tribunal te demande de te rendre Ă  une audience. Il s’agit donc d’une action, mais aussi d’un document que tu reçois en main propre de l’huissier.e. Si jamais tu es absent.e, tu reçois un courrier de l’huissier.e qui t’informe que le document est disponible Ă  son cabinet. C’est assez important d’obtenir ce document, sans lequel tu peux ne pas savoir quel est le jour de ton procĂšs, et donc le louper.
Tu peux en voir un exemple ici


Commandement de quitter les lieux :
Suite Ă  ton procĂšs, le juge a Ă©tabli une date Ă  partir de laquelle tu deviens expulsable (« une date d’expulsabilitĂ© »). A la suite de cette dĂ©cision, tu devrais recevoir un commandement de quitter les lieux, qui donne gĂ©nĂ©ralement un dĂ©lai de 2 mois pendant lesquels tu ne peux pas ĂȘtre expulsĂ©.e. Parfois, ce document arrive dans la semaine qui suit la dĂ©cision du juge, parfois plus tardivement.

Comme l'assignation, l’huissier.e passe au squat pour remettre le document en main propre, si tu es abent.e, tu devras aller chercher ce document directement Ă  son Ă©tude.

-A NE PAS CONFONDRE AVEC LA SOMMATION DE QUITTER LES LIEUX- : le commandement est une information sérieuse, contrairement à la sommation


Cour d'Appel (CA) :
La cour d’appel est une juridiction qui permet de demander Ă  ce qu’une affaire soit rejugĂ©e. Tu peux faire appel si toi, ou la personne contre qui tu Ă©tais en procĂšs, vous n’ĂȘtes pas d’accord avec la dĂ©cision de la juge de premiĂšre instance. La cour rend un « arrĂȘt », qui peut confirmer ou non la premiĂšre dĂ©cision, ou n’en confirmer qu’une partie, c’est qu’elle appelle “rĂ©former”  . AprĂšs un arrĂȘt de la cour d’appel, il reste une Ă©tape si on est toujours en dĂ©saccord (et qu’on peut payer) la cour de cassation. 
La cour d’appel n’est pas compĂ©tente pour les affaires administratives, pour cela il faut passer par la cour adminsitrative d’appel. Elle statue uniquement sur les affaires pĂ©nales et civiles. 
Il y a actuellement trente-six cours d'appel en France.

Entrée par voie de fait :
L'entrĂ©e par voie de fait est le fait d'entrer dans un bĂątiment de façon illĂ©gale. Hormis si la porte Ă©tait ouverte, quasiment toute autre façon d'entrer peut tomber sous le coup de cette appellation. Lors d'un jugement pour squat, la preuve de la voie de fait est Ă  apporter par le propriĂ©taire. 

TrĂȘve hivernale :
La trĂȘve hivernale couvre la pĂ©riode du 1er novembre au 31 mars de l'annĂ©e suivante. Durant cette pĂ©riode, les expulsions locatives ne peuvent pas avoir lieu. Cette trĂȘve ne s'applique pas aux squatteur.euse.s pour lesquel.le.s la voie de fait a Ă©tĂ© retenue. 

Voie de fait :
En droit civil et en droit administratif, la “voie de fait” dĂ©signe un acte illĂ©gal portant atteinte aux droits de la personne ou aux libertĂ©s fondamentales. Dans notre cas, il s'agit de porter atteinte au droit de propriĂ©tĂ© qui a Ă©tĂ© revalorisĂ© par la loi Kasbarian. 
 
Si tu es occupant.e, tu peux ĂȘtre accusĂ©.e par dĂ©faut des dĂ©gradations qui ont permi de rentrer dans le batiment (c’est l’entrĂ©e par voie de fait) mĂȘme si rien ne prouve que c'est toi qui les a commises : effraction, vitre cassĂ©e, changement de serrure...

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